Étude sur la nosologie et la détection de l'autisme

Tomoko SUGANO1), Akiko YOSHIDA1), Takeshi MATSUISHI1), Keiko ENDO2)


1) Université nationale de Yokohama, Faculté d'Éducation et de Sciences humaines
2) Université de Yokohama, Faculté de Médecine, Département de Psychiatrie

Il est parfois difficile d'obtenir une représentation clinique des individus et des enfants autistes. En effet, les signes et les symptômes peuvent varier d'un patient à l'autre et évoluer en fonction de l'âge. C'est pour cette raison que les enquêtes réalisées pour cette étude ciblaient les parents d'individus ou d'enfants autistes. L'optique des enquêtes était donc de cerner les signes et les symptômes en tenant compte des évolutions liées à l'âge. En fonction de leurs symptômes, nous avons classé les patients en sous-groupes (sous-classification) et subdivisé les caractéristiques en deux périodes : symptomatique et adolescente. En outre, nous avons étudié les types d'évolution des symptômes au cours de la croissance. L'étude portait sur 89 autistes souffrant de retard mental (dont 73 de sexe masculin) pris en charge par le Centre social et médical de Yokohama ou le Centre social et médical des préfectures de Kanagawa entre octobre 1994 et octobre 1995. La fourchette d'âge était comprise entre 17 et 30 ans, la moyenne étant de 19,6 ans.
Pour réaliser l'étude, nous avons conçu un questionnaire adressé aux parents de patients autistes. Les parents des patients ont répondu à 30 questions basées sur les critères de diagnostic DSM-III-R. L'enquête portait sur la situation actuelle (adolescence) de l'individu et sur la période la plus difficile pour les parents (phase la plus symptomatique). Les données obtenues ont été analysées en procédant à une étude continue multivariée suivant les méthodes japonaises de quantification multivariée de type 3, et à une analyse cluster des deux étapes. Les résultats ont révélé que l'étape la plus symptomatique correspond à deux fourchettes d'âges : entre 3 et 8 ans et entre 13 et 15 ans. En appliquant un traitement statistique, nous avons classifié la phase la plus symptomatique en 3 sous-groupes. Le sous-groupe 1 comprenait des individus dont les symptômes étaient caractéristiques des signes A, B et C des critères DSM-III-R. Ils réunissaient donc clairement tous les aspects des symptômes de l'autisme. Il s'agissait du groupe souffrant des symptômes les plus sévères. Le sous-groupe 2 comprenait des individus dont les symptômes étaient spécifiques aux signes A des critères DSM-III-R. Ces individus souffrent de troubles de l'interaction sociale avec une tendance à l'isolement. Les individus du sous-groupe 3 affichaient des symptômes spécifiques aux signes B des critères DSM-III-R, caractérisés par des difficultés de communication interpersonnelle causée par des troubles du langage (discours unilatéral ou répétition de phrases, par exemple). Cependant, il s'agit de personnes qui désirent communiquer. Le sous-groupe 1 représentait 50,6 % de l'échantillon, le sous-groupe 2 : 23,6 %, le sous-groupe 3 : 7,8% et 18 % des patients n'étaient pas classifiables. Les individus en phase adolescente (18 ans ou plus) ont également été divisés en sous-groupes en appliquant la même méthode quantitative. Le sous-groupe 1 en phase adolescente affichait les mêmes caractéristiques que le sous-groupe 1 dans la phase la plus symptomatique. Par contre, le sous-groupe 2 en phase adolescente différait du sous-groupe 2 dans la phase la plus symptomatique. Ce groupe comprenait des individus dont les symptômes répondaient aux critères DSM-III-R, à savoir des actions répétitives, des tendances à la persévération, un état tétanisé, etc. Le sous-groupe 3 en phase adolescente présentait moins de symptômes. Ils ont tous une caractéristique en commun : l'écholalie. En phase adolescente, le sous-groupe 1 est passé à 10,1 % de l'échantillon, le sous-groupe 2 à 36 % et le sous-groupe 3 à 34,8 % (19,1 % des cas étaient inclassifiables). Environ la moitié des individus du sous-groupe 1 lors de l'étape la plus symptomatique ont été reclassés dans le sous-groupe 2 lors de la phase adolescente et un tiers dans le sous-groupe 3. Environ 40 % des patients du sous-groupe 2 dans l'étape la plus symptomatique sont restés dans le sous-groupe 2 lors de la phase adolescente et 40 % ont été reclassés dans le sous-groupe 3. Quant au sous-groupe 3 lors de l'étape la plus symptomatique, il n'y a eu aucune reclassification lors de la phase adolescente. La tendance générale est la suivante : les individus présentant les symptômes A, B et C des critères DSM-III-R passent de la moitié à 10 % de l'échantillon, et la proportion des individus avec les symptômes B et C tend à augmenter en terme relatif. Ces résultats ont été comparés avec la classification de Wing (1974) ainsi que d'autres études réalisées par Siege (1986), Eaves (1994) et O'brien (1996). Nos conclusions concordaient pratiquement. Les inconsistances sont dues à la différence dans les méthodes d'échantillonnage et d'analyse. Nous avons étudié l'évolution des symptômes en fonction de l'âge. Les symptômes d'autisme évoluent avec l'âge et, en général, s'atténuent. Cependant, certains problèmes surgissent après l'adolescence, notamment la situation de l'emploi. Les patients sont alors confrontés à un certain nombre de nouveaux obstacles. En conclusion, l'autisme peut être divisé en plusieurs sous-groupes en fonction des symptômes. Nous avons également confirmé que les symptômes de l'autisme évoluent avec le temps. Par conséquent, nous souhaitons mettre en relief l'importance d'une compréhension précise des symptômes d'un individu autiste en fonction de son âge, en tenant compte des évolutions à long terme. Soulignons également qu'il est essentiel de prendre en compte la situation d'éducation, de soins médicaux et de soins sociaux des patients autistes.

(publication originale dans le Journal of disability and medico-pedagogy, Vol.8.2003.p.13-14.)

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